La première fois que j’ai vu jouer Esteban Capilla, c’était le 1er mai 2021 pour un match de la catégorie espoirs contre Mont-de-Marsan.

Comme vous pouvez le voir sur la vidéo ci-dessus, le match s’est déroulé sur le terrain d’honneur de Jean Dauger, COVID oblige.
Dans cette période troublée, seuls les espoirs avaient le droit de jouer à l’instar des pros, mais comme eux, à huis-clos, seules les personnes autorisées par le club pouvaient assister aux rencontres.
Autant vous dire qu’il y avait de la resquille, on est en France, faut pas l’oublier.
La tribune Kéolis était encore en travaux et les portes du chantier avaient une notion de gruyère très prononcée.
Esteban était encore Crabos, il était monté en Espoirs avec Max Bru, car tous les deux avaient eu 18 ans récemment et pouvaient donc à ce titre postuler à une place dans le groupe de joueurs sélectionnés pour ce match.
J’avais raconté, alors, dans ma chronique hebdomadaire l’entrée d’Esteban, je vous la livre telle quelle.

 

–       Le match tirait ses derniers instants, c’était un 1er mai joyeux où les essais se sont empilés, 5 côté Bayonnais, 3 côté Montois, le soleil était de la partie comme la plupart du temps dans cette saison pandémique.
À l’instar de Proust qui recherchait un temps perdu, les bleus étaient dans la quête d’un 6ème essai, synonyme de bonus offensif, le gain de la partie étant déjà dans la poche. 
Et puis l’esprit de Max Guazzini est passé, accompagné de Dalida, elle fredonnait un truc qui ressemblait à Il venait d’avoir 18 ans et au même moment, une touche est rapidement jouée par Ayarza, le ballon arrive au milieu du terrain où l’attend Esteban Capilla à 60 mètres de la ligne d’en-but adverse, piaffant d’impatience. 
A peine majeur, le gamin, fort comme un homme, a déplié ses longs compas. D’une simple accélération, il s’est joué de trois adversaires, sans baisser sa vitesse de course. Avec deux crochets intérieurs tout en souplesse, il en a éliminé deux autres pour aller marquer tout seul sous les poteaux. 
Tonitruante entrée dans le monde des espoirs pour ce jeune Crabos, dont c’était la deuxième apparition à ce niveau, et cet instant de plénitude, je crois, restera longtemps gravé dans son esprit, pour toute la symbolique d’une première fois, qui plus est, dans l’antre du nouveau Jean Dauger.

 

J’avais été impressionné par sa gestuelle, sa vitesse de course, sa prise de risque et la facilité avec laquelle il s’était débarrassé de ses adversaires.
J’ai filmé la vidéo de cet essai pour le montrer à de vieux potes qui, comme le disait Jean-Pierre Rives, n’ont plus le ballon, mais à qui il reste l’amour du jeu et des vieilles histoires.
Je leur ai dit de retenir le nom de ce joueur parce qu’il y a fort à parier qu’on en entendrait vite parler.
C’était il y a 3 ans, presque une éternité dans une carrière d’athlète de haut niveau…
Esteban, durant ces 3 ans, a rempli son palmarès et engrangé quelques titres :

–       Vainqueur du Supersevens en 2021 avec les Barbarians Français

–       Champion du monde avec l’équipe de France des -20 en Afrique du Sud

–       Vainqueur de la série mondiale à 7 avec l’équipe de France à Madrid

–       Élu meilleur joueur du Supersevens 2023

 

Je me souviens de deux tournois du supersevens : à Perpignan en 2022 et à Lyon en 2023, il est le capitaine de l’équipe bayonnaise et le meilleur joueur sur le terrain, toutes équipes confondues.
Dans la capitale, presqu’à lui tout seul avec l’aide de Victor Hannoun, il emmène son équipe en demi-finale contre Pau, malheureusement Esteban va se blesser sur le coup d’envoi et Victor vite après.
Privés de ses deux meilleurs joueurs, trop handicapés, les Bayonnais vont s’incliner, le rêve de la finale était passé.
La blessure a souvent été la mauvaise compagne d’Esteban, le privant sûrement d’une place dans l’équipe de France Olympique cet été aux côtés de Dupont et consorts.
Je suis content qu’il puisse enfin exprimer tout son potentiel, qui n’était pas passé inaperçu aux yeux de Sébastien Calvet sélectionneur des -20 qui l’avait retenu en 3ème ligne aux côtés de Nouchi, Jégou, Gazzoti, Castro-Ferreira et Timo, excusez du peu.
J’ai été très agréablement surpris de voir sa capacité défensive sur les deux derniers matchs, ses plaquages aux chevilles, voire même en dessous, clouant au sol, de façon irrémédiable, tous les adversaires pris dans les filets de ses bras tentaculaires.
Une sorte de pieuvre, au plaquage définitif, qui rappelait à certains (très) anciens joueurs le style Aussel et la prédisposition de Stéphane à plaquer très bas son vis-à-vis et de le mettre au sol sans aucun espoir de résistance.
En tout cas, j’espère qu’Esteban pourra, très bientôt, inscrire le même essai que celui qu’il a marqué il y a 3 ans contre les Espoirs de Mont-de-Marsan, mais cette fois-ci dans un stade rempli d’une ferveur toute bayonnaise.
On verra, alors, son visage s’éclairer de ce grand sourire qu’il partage avec tous ceux qui le lui rendent…
Je vous laisse imaginer la taille du sourire si les 14.000 spectateurs de Dauger ressemblent à l’émoji de l’Happy Smile version XXXL 😀😀😀

À toi de jouer, Esteban…